TOP 10 : Deckbuilders (jeux de développement de pioche)

Houlala ! Voilà qui commence l’année en force ! À la demande générale de la Communauté de l’As des jeux, je vous offrirai de temps à autre des articles comme celui-ci, qui présentent un palmarès de jeux basés sur une même thématique ou sur une même mécanique. J’ai décidé de commencer par les deckbuilders.

Qu’est-ce que les deckbuilders ? On pourrait traduire par « développement de pioche », même si c’est résolument l’expression en anglais qui prédomine dans les communautés de ludistes francophones. Les deckbuilders sont des jeux où tous les joueurs commencent la partie avec un paquet identique de cartes de base. Au fil des tours, ils pourront développer ce paquet en achetant de nouvelles cartes (et aussi en détruisant les cartes de base), suivant leur stratégie. 

Avant de vous présenter mon palmarès, quelques mots sur deux principes généraux qui ont dicté mes choix :

 

1-La mécanique du deckbuilding doit être centrale et essentielle dans le jeu;

 

2-Le jeu (ou une de ses versions) doit être encore édité et offert en magasin

 

 

À ces principes fondamentaux, j’ai ajouté trois critères secondaires qui m’ont permis d’en arriver à une sélection réduite :

 

3-Le jeu doit être offert en français;

 

4-Se joue idéalement en une heure ou moins;

 

5-Le jeu est accessible au plus vaste public possible


Malgré tous ces principes et critères, il restait encore beaucoup de jeux en lice, et j’ai dû faire des choix déchirants. Au départ, je pensais faire un top 3; c’est ensuite devenu un top 5, et je me suis finalement résigné à l’idée d’un top 10. Et c’est un top 10 un peu atypique : les jeux n’y sont pas classés par mérite, mais bien par catégorie. J’ai relevé 10 catégories différentes de deckbuilders, et je vous présente mon jeu préféré dans chacune d'entre elles. Je trouve que c’est un peu plus utile comme ça, d’une part parce que classer les jeux par « mérite » est un exercice très (trop) subjectif, d’autre part parce que ça permettra à ce palmarès de mieux vous aiguiller vers des jeux qui pourraient vous intéresser.

Dernière remarque, avant de commencer : tous les jeux présentés ici sont dans ma collection personnelle, qui est très bien garnie, mais qui est aussi incomplète. Il se peut que les versions disponibles de ces jeux ne soient pas tout à fait les mêmes que celles que j’ai en ma possession. De plus, force est d’admettre que je n’ai pas joué à tous les deckbuilders publiés, et il se peut fort bien qu’il y ait des perles qui aient malencontreusement été exclues de mon palmarès pour cette raison. C’est la vie! C’est donc avec toute l’humilité d’une ignorance bien assumée que je vous présente ce modeste TOP 10 DES DECKBUILDERS!


  • Catégorie « Classique » : Dominion !
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    Ah, que dire de ce monument, de cette légende ! Dominion, de Donald X. Vaccharino est considéré comme le père de tous les jeux du genre. Mais vous savez, c’est comme la poutine, il se trouve toujours un ou deux casse-pieds pour venir remettre en question l’origine de la chose. Question de ne pas faire déraper le débat, je me contenterai de dire que Dominion est L’UN des jeux ayant popularisé le genre. Il a été publié en 2007, réédité en 2016, et compte à ce jour 15 extensions (et une 16e annoncée pour 2024).


    Dominion, c’est le vrai de vrai deckbuilder. La mécanique authentique. L’origine de toute chose. L’Anneau Unique de Sauron (« un deckbuilder pour les gouverner tous »)! Le Big Bang. Et ne vous laissez pas berner par son âge (17 ans, c’est presque préhistorique pour un jeu dans le monde d’aujourd’hui!), j’affirme sans trop d’embarras que, malgré la quantité épouvantable de « nouveaux » deckbuilders publiés chaque année, Dominion n’a pas encore trouvé son égal pour ce qui est de la simplicité et de l’efficacité de l’exécution. Ici, pas de plateau de jeu, pas de figurines, pas de mise en place qui prend une éternité, pas de livret de règles de 75 pages : juste des cartes, des cartes et encore des cartes.


    Dans Dominion, vous essayez d’être le joueur qui développe le domaine le plus prestigieux; ce domaine, c’est votre paquet de cartes. Vous commencez la partie avec un paquet de dix cartes de base, que vous allez ensuite améliorer en achetant de nouvelles cartes dans un marché commun situé au centre de la table. Les cartes du marché sont choisies au début de chaque partie parmi un vaste éventail de possibilités qu’offre le jeu.


    Le but est de trouver un moyen d'acheter les précieuses cartes Province, qui coûtent très cher, mais qui valent beaucoup de points. Le hic, c’est que les cartes donnant du prestige ne servent à rien; plus on en ajoute dans notre paquet, plus ce dernier est encombré de cartes payantes mais inutiles. Il est donc impératif de trouver des stratégies en cours de partie (notamment grâce aux cartes disponibles dans le marché) pour contourner cet obstacle grandissant. Lorsque la dernière carte Province a été achetée, hop ! la partie est terminée et l’on compte les points.


    Une fois le fonctionnement du jeu bien assimilé, une partie de Dominion à quatre joueurs dure en moyenne 20 à 30 minutes. C’est redoutablement efficace. On peut enchaîner plusieurs parties et tenter à chaque fois de nouvelles stratégies en s’adaptant aux cartes disponibles. Et lorsque vous aurez fait le tour de toutes les cartes et de tous les agencements possibles dans la boîte de base, il vous restera encore 15 extensions pour vous désennuyer, chaque fois avec de nouvelles cartes et de nouvelles mécaniques. 


    Dominion, de Donald X. Vaccharino

    Publié par Rio Grande, 2 à 4 joueurs, 10 ans et +, 30 minutes par partie.


  • Catégorie « Course » : La course vers El Dorado !

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    Le concepteur allemand Reiner Knizia, réputé pour ses jeux alliant simplicité et stratégie, nous propose ce deckbuilder tendu et amusant paru en 2017 et tout récemment réédité. Il a eu l’idée de se baser sur la mécanique du deckbuilding typique de Dominion et de l’intégrer dans un jeu de style « course à obstacles ». 


    Dans La course vers l’El Dorado, vous incarnez des aventuriers (à la Indiana Jones, chapeau inclus!) qui compétitionnent pour atteindre en premier la mystérieuse Cité d’Or ! (Aaaah-Ah-Ha-Ah-Ha ! Estebaaaan, Ziaaaaa !) Mais cette course ne sera pas facile, puisqu’il faudra pour cela traverser les jungles touffues, les rivières sournoises, les déserts arides et les montagnes hostiles ! Ici, on ne se formalise pas avec le comptage de points : le premier arrivé à El Dorado gagne ! À vos cartes ! Prêts ? Partez !


    Les cartes de La course vers l’El Dorado représentent des membres de notre expédition et des outils qui nous aideront à franchir les obstacles qui nous ferment la route de l’El Dorado. Chaque symbole (machette, rame ou pièce d’or) présent sur une carte nous permet de franchir une case du plateau affichant le symbole correspondant. Les pièces d’or peuvent également être utilisées pour acheter de nouvelles cartes plus efficaces pour améliorer notre paquet et accélérer notre voyage.


    Les parties d’El Dorado sont rapides, très tendues et nous gardent dans le feu de l’action jusqu’au fil d’arrivée. Souvent, la victoire ne tient qu’à un fil (ou à une carte) ! Comme les aventuriers se bloquent les uns les autres sur le plateau, il faut savamment calculer nos déplacements, et autant que possible s’arrêter dans des emplacements qui forcent nos adversaires à faire des détours, puisque ce tour perdu à contourner un adversaire est peut-être celui qui fera la différence entre le gagnant et le perdant !


    La course vers l’El Dorado propose un plateau modulaire coloré, constitué de grandes tuiles qu’on assemble pour faire des parcours différents dont la difficulté peut varier. C’est un jeu rapide (30-45 min) et facile à prendre en main, qui constitue une excellente initiation à la mécanique du deckbuilding.


    La course vers l’El Dorado, de Reiner Knizia

    Publié par Ravensburger, 2 à 4 joueurs, 8 ans et +, 30-60 minutes par partie


  • Catégorie « Aventure » : Clank ! Les aventuriers du deckbuilding

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    Dans un univers fantastique à l’humour déjanté, Clank! nous permet d’incarner des héros fauchés qui tentent le coup du siècle en s’aventurant dans un donjon périlleux rempli de trésors… et gardé par un terrible dragon !


    Un peu comme dans La course vers El Dorado, les symboles sur nos cartes nous permettent de nous déplacer, de combattre des créatures maléfiques et d’acheter de nouvelles cartes. Ce faisant, à la recherche des précieux artefacts, on s’enfonce de plus en plus loin dans le souterrain, pour le meilleur et pour le pire. Attention ! certaines cartes génèrent du bruit (« Clank! ») qui risque d’attirer sur nous la fureur du dragon qui s’éveille de temps à autre. Plus on s’aventure profondément dans ce labyrinthe mortel, plus les récompenses sont intéressantes, mais il faudra s’assurer d’avoir le temps de ressortir avec nos trésors avant d’être grillés par le dragon !


    Il existe plusieurs versions et extensions de Clank! dont une version « dans l’espace ». Chaque version intègre quelques nouveautés au jeu tout en conservant l’essentiel de ses mécaniques. Ma version préférée est Clank! Catacombs dont le plateau est modulaire et change à chaque partie. Malheureusement, cette version n’est pas encore disponible en français (mais ça devrait arriver bientôt !)


    Clank! Les aventuriers du deckbuilding, de Paul Dennen

    Publié par Renegade Games, 2 à 4 joueurs, 10 ans et +, 30-60 minutes par partie


  • Catégorie « Coopératif » : Aeon’s End !

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    Aeon’s End est un succès de sociofinancement de 2016 qui compte maintenant deux versions « Legacy » et plus d’une dizaine d’extensions. Dans ce deckbuilder coopératif, vous incarnez des magiciens chargés de défendre un village contre l’assaut des Némésis, des créatures puissantes et maléfiques. Les parties sont de type « bataille contre le boss » : il faut réduire les points de vie de la Némésis à zéro avant qu’elle n’ait eu le temps de détruire le village (ou de nous exterminer).


    Détruire une Némésis n’est pas chose facile, même pour de vaillants magiciens ! Pour lancer nos puissants sortilèges, il faudra ouvrir nos Brèches, sortes de tunnels par lesquels la magie circule. Un sortilège préparé dans une Brèche ne sera lancé qu’au début du tour suivant : c’est donc dire que la planification est absolument essentielle.


    Contrairement aux autres deckbuilders, dans Aeon’s End, on ne mélange jamais notre paquet de cartes ! Lorsque notre pioche est épuisée, on retourne simplement notre défausse et l’on continue. Il est ainsi possible de contrôler l’ordre de nos cartes, de manière à planifier de meilleures synergies entre les cartes piochées. Cela permet une profondeur stratégique qu’on ne voit pas souvent dans les deckbuilders.


    Chaque magicien possède un pouvoir exclusif et chaque Némésis (il y en a plusieurs dans la boîte de base) est dotée de mécaniques de jeu uniques. En ajoutant à cela la composition variable du marché de cartes à toutes les parties, on obtient un jeu aux possibilités presque infinies.


    Aeon’s end compte plusieurs boîtes (dont deux “Legacy” qui sont toutes indépendantes les unes des autres. Je suggère de commencer par le jeu de base pour vous familiariser avec les mécaniques de jeu, puisque les boîtes subséquentes ajoutent généralement des règles (et du matériel) supplémentaires.


    Aeon’s End, de Kevin Riley

    Publié par Indie Board Games, 2 à 4 joueurs, 12 ans et +, 60 minutes par partie.


  • Catégorie « Historique » : Inflexibles : Normandie !
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    Si la science-fiction et la fantasy ne sont pas votre tasse de thé, peut-être qu’Inflexibles : Normandie saura capter votre intérêt avec sa thématique Seconde Guerre mondiale. Dans ce deckbuilder de type « duel », deux joueurs s’affrontent sur les champs de bataille de Normandie en 1944. 


    Chaque joueur commence avec un paquet de cartes représentant des soldats qui composent ses bataillons déployés sur le plateau de jeu. Lors d’un tour, on joue trois cartes qui permettent d’activer les bataillons correspondants et de leur faire accomplir différentes actions : reconnaître le terrain, se déplacer, combattre des unités adverses, appeler des renforts…


    L’issue des combats est déterminée par le roulement de dés, mais en jouant stratégiquement, on peut se mettre « du bon bord » des statistiques : certains lieux offrent de meilleures défenses contre l’ennemi! Lorsqu’un bataillon subit des pertes, un des soldats correspondant à ce bataillon, dans notre main, notre pioche ou notre défausse, est retiré du jeu ! Lorsque tous les soldats (cartes) composant ce bataillon ont été éliminés, il est retiré du jeu. 


    Inflexibles : Normandie propose une série de douze scénarios différents dont la complexité est croissante. Chaque faction a ses objectifs particuliers à accomplir pour remporter la victoire (cela passe souvent par le contrôle de lieux clés sur le champ de bataille). 


    Il y a désormais plusieurs jeux dans cette série (tous sont indépendants et ne nécessitent pas de posséder les autres) : Normandie, Afrique du Nord, la Bataille d’Angleterre et finalement Stalingrad (ce dernier est une version de type « Legacy »).


    Inflexibles : Normandie (Undaunted : Normandy), de David Thompson et Trevor Benjamin

    Publié par Osprey Games, 2 joueurs, 12 ans et +, 45-60 minutes


  • Catégorie « Science-fiction » : Star Realms
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    Nous revenons maintenant à la simplicité, l’esprit même d’un deckbuilder. En ce sens, Star Realms, publié en 2014, est un digne héritier de Dominion. Dans ce duel intergalactique qui rappelle parfois Magic the Gathering, deux commandants s’affrontent. Le but : détruire la base adverse en réduisant ses points d’influence à zéro.


    À partir de nos dix cartes de base, il faudra acquérir de nouveaux vaisseaux spatiaux, construire des bases stellaires pour se protéger, attaquer les bases ennemies pour maintenir la pression et chercher les synergies payantes entre nos cartes. Il y a quatre factions représentées par des couleurs (rouge, jaune, vert et bleu) et les cartes d’une même faction ont souvent tendance à s’améliorer réciproquement lorsqu’elles sont jouées lors d'un même tour. On aura donc tout avantage à restreindre nos allégeances de manière à pouvoir tirer le maximum de nos cartes.


    Chose rare de nos jours, Star Realms est une boîte minuscule qui entre à merveille dans votre poche ou dans votre valise, ce qui en fait un jeu de voyage intéressant… à moins que ne soyez accros au point de vous procurer les multiples extensions, qui vous obligeront sans doute à ranger le tout dans une boîte plus volumineuse. 


    Somme toute, même s’il ne réinvente pas la roue, Star Realms est un jeu rapide et extrêmement efficace, qui nous permet d’enchaîner les parties sans se prendre la tête. Que demander de plus ?


    Notes : Wise Wizards vient tout juste de rééditer le jeu en Box set, qui contient le jeu de base et quelques modules d’extension. Pour les mordus de fantasy, Hero Realms, du même auteur, propose sensiblement le même jeu, enrobé d’une thématique et d’une direction artistique différentes.


    Star Realms, de Robert Dougherty

    Publié par Wise Wizards, 2 joueurs, 8 ans et +, 20 minutes par partie


  • Catégorie « Conquête » : Les Tyrans de l’Ombreterre
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    Les amateurs de longue date de Donjons et Dragons reconnaîtront la thématique fantastique d’Ombreterre, popularisée par les romans de la Trilogie de l’Elfe noir de R.A. Salvatore. Dans ce vaste monde souterrain, les joueurs incarnent des familles d’elfes noirs se livrant un impitoyable combat pour le contrôle de lieux clés. Ne vous laissez pas rebuter par le design graphique un peu particulier (tout est noir et violet : les cartes, le plateau… jusqu’aux jetons de points de victoire! Je sais, on est dans un souterrain, il fait noir, mais quand même…) c’est un excellent jeu qui saura assouvir vos instincts maléfiques et belliqueux !


    Les Tyrans de l’Ombreterre combine la rapidité et l’efficacité du deckbuilding avec l’aspect stratégique des jeux de conquête et de contrôle de territoire. Ici, les interactions entre les joueurs sont nombreuses : les cartes jouées à chaque tour permettent de déployer des troupes sur le terrain, d’assassiner celles de nos adversaires, de déployer des espions, ou de se procurer de nouvelles cartes plus puissantes. Lorsqu’un joueur contrôle totalement l’une des cités du plateau, il se met alors à engranger des ressources et des points de victoire à chaque tour ! Il faut donc essayer de consolider nos positions, tout en empêchant le plus possible nos adversaires d’accumuler trop de points.


    Les Tyrans de l’Ombreterre (Tyrants of the Underdark), de Peter Lee, Rodney Thompson et Andrew Veen

    Publié par Gale Force Nine, 2 à 4 joueurs, 14 ans et +, 60 minutes par partie


  • Catégorie « Original » : Mystic Vale
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    John D. Clair, qui nous a notamment offert l’excellent Space Base et le délirant Cubitos, a lancé avec Mystic Vale ce qu’il appelle le Card Crafting System ou, si vous préférez, le Système de Fabrication de Cartes. Il s’agit d’une variante originale du deckbuilding où, plutôt que d’acheter constamment de nouvelles cartes à ajouter à notre pioche, on modifie plutôt les cartes existantes en leur ajoutant des bonus et des effets pour les rendre de plus en plus puissantes. C’est vraiment bien pensé (mais si vous détestez les pochettes protectrices, vous serez quittes pour un bon traumatisme)!


    Dans Mystic Vale, on incarne des clans de druides qui doivent lutter contre la corruption qui s’attaque à leur forêt. Pour y arriver, il faudra faire évoluer nos cartes pour générer de plus en plus de ressources, nous permettant ainsi d’acquérir les améliorations les plus puissantes (celles qui génèrent des points de victoire) et les cartes Val (qui VALent des points, la pognez-vous? Boudoum Pischhhhh!). Selon le nombre de joueurs, il y a un nombre défini de points de victoire disponibles; lorsque la banque est épuisée, la partie se termine et l’on compte nos points !


    Au début, beaucoup de nos cartes sont entièrement vierges, alors que d’autres génèrent un peu de mana (utilisé pour acheter des améliorations). Lorsqu’on achète une amélioration, on l’insère dans la pochette de l’une des cartes jouées ce tour-ci ! Chaque carte dispose de trois emplacements d’amélioration (haut, centre, bas). Seules contraintes : on ne peut pas superposer d’améliorations (deux en haut, par exemple) et on ne peut jamais les retirer une fois achetées. Il faudra donc choisir judicieusement, chercher à créer des combos ou des synergies intéressantes sur les cartes que l’on fabrique.


    Pour couronner le tout, Mystic Vale intègre également une mécanique de prise de risque (Push your luck) un peu comme celle que l’on retrouve dans des jeux comme les Charlatans de Belcastel. Plutôt que de piocher un nombre de cartes fixe à chaque tour, on pioche jusqu’à ce qu’on ait cumulé trois symboles Déclin (un arbre rouge, présent sur plusieurs cartes de départ et sur certaines améliorations). Dès lors, on peut choisir de continuer à piocher OU d’arrêter. Prendre le risque de continuer peut s’avérer payant (plus de ressources pour acheter de meilleures améliorations!), mais aussi fatal, car au quatrième symbole de Déclin, toutes nos cartes sont automatiquement défaussées et on perd notre tour ! 


    Mystic Vale constitue une variante originale et réussie qui a certainement sa place dans toute collection de deckbuilders. Personnellement, je préfère y jouer à deux, parce que les parties sont plus rapides et qu’il est plus facile de savoir ce que fait notre adversaire. Le système de fabrication de cartes est génial, mais il vient aussi avec un petit désagrément : à chaque fin de partie, il faut déconstruire toutes les cartes en retirant les améliorations des pochettes protectrices. Mystic Vale a reçu, au fil des années, huit ou neuf extensions pour ajouter de la diversité à vos parties (mais il y a déjà beaucoup de contenu dans la boîte de base). De plus, une « Édition Essentielle » a été publiée en 2020 et inclut le jeu de base et trois extensions.


    Mystic Vale, par John D. Clair

    Publié par AEG, 2 à 4 joueurs, 14 ans et +, 30 à 45 minutes par partie


  • Catégorie « Legacy » : Harry Potter : Bataille à Poudlard
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    Bon, je vais vous faire une confidence : je n’aime pas trop les jeux « Legacy ». J’ai fait Pandémie Legacy Saison 1 et 2 et, lorsque j’ai eu terminé, quelque chose en moi était profondément choqué de me retrouver avec une boîte de jeu complètement inutile (on ne peut plus y rejouer une fois la campagne terminée). Je me suis dit : « plus jamais! » Mais il faut dire que les concepteurs de jeux ont appris de leurs erreurs et que beaucoup des jeux « Legacy » permettent maintenant de réinitialiser le matériel ou encore de continuer à jouer avec l’ensemble des contenus découverts pendant la campagne. Harry Potter : Bataille à Poudlard fait heureusement partie de cette dernière catégorie.


    Dans ce deckbuilder coopératif assez classique, les joueurs incarnent leurs personnages préférés de la saga de JK Rowling (Harry, Hermione, Ron et… Neville ? Qui voudrait jouer Neville?) qui doivent déjouer les plans des infâmes Serpentard et, éventuellement, vaincre « le dude qu’on peut pas prononcer le nom de » (oui oui, j’ai lu la traduction outaouaise).  Le jeu propose sept chapitres qui correspondent grosso modo aux différents livres de la série. Chaque nouveau chapitre intègre des cartes supplémentaires, plus de méchants à tabasser et aussi de nouvelles mécaniques de jeu (et plus de difficulté, aussi!) 


    Chaque personnage commence avec des cartes de départ uniques qui l’orientent vers certaines stratégies (combat, ressources/achat de carte, alliés, guérison, etc.) Les joueurs doivent ensuite développer leur paquet de cartes tout en se coordonnant de manière à bien se compléter les uns les autres, ce qui est l’esprit même d’un jeu coopératif. Pour gagner, il faut réussir à vaincre tous les vilains de chacun des chapitres (et croyez-moi, certains d’entre eux sont TRÈS vilains!) Seule tache au tableau pour moi : plus les chapitres avancent, plus il y a de cartes… et parfois, en début de partie, la malchance fait en sorte que le marché se retrouve encombré de cartes vraiment trop chères, ce qui donne la frustrante impression qu’on ne peut simplement pas gagner. C’est toutefois un problème qu’on peut régler facilement par une ou deux « règles maison » pour améliorer la composition du marché.


    En somme, si vous êtes adeptes de Harry Potter et des jeux de société coopératifs, Bataille à Poudlard est un incontournable du genre et devrait faire partie de votre collection. On peut rejouer la campagne autant de fois que l’on veut, et deux extensions ont été publiées pour rajouter encore plus de contenu.


    Harry Potter : Bataille à Poudlard (Hogwarts Battle), de Forest-Pruzan Creative, Kami Mandell et Andrew Wolf

    Publié par USAopoly, 2 à 4 joueurs, 11 ans et +, 30 à 60 minutes par partie


  • Catégorie « Complexe » : Concordia Vénus
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    Je me voyais mal terminer ce « top-10 » sans vous présenter un jeu qui détonne un peu des autres deckbuilders de par son ampleur et sa complexité, mais qui est néanmoins l’un de mes jeux préférés de tous les temps. Ce n’est peut-être pas le jeu le plus tape-à-l’œil ni le plus à la mode (il n’y a pas 175 figurines en plastique, pas de retentissantes campagnes de sociofinancement pour sortir une 48e extension…), mais, dans mon petit cœur de gamer, il est parfait. Classique. Élégant. Original. Intemporel. Simple et complexe tout à la fois. C’est Concordia (je joue avec la version Concordia Venus qui est plus complète).


    Dans Concordia, nous sommes des commerçants de l’Empire romain rivalisant pour étendre notre réseau commercial à travers l’une des régions du grand empire. Les joueurs commencent tous la partie avec une main identique de cartes représentant des personnages de la société romaine. À notre tour, c’est simple : on joue UNE des cartes de notre main et on fait l’action associée au personnage qui y est représenté. Par exemple, on peut déplacer nos agents sur le plateau, construire des comptoirs commerciaux, vendre et acheter des marchandises, acheter de nouvelles cartes, etc. Au fil des tours, on a donc de moins en moins de cartes en main (et de moins en moins de possibilités d'actions). Pour récupérer nos cartes, il faut jouer le Tribun, qui nous permet de reprendre en main toutes nos cartes défaussées. La partie se termine lorsqu’un joueur a construit tous ses comptoirs commerciaux, ou lorsque toutes les cartes du marché ont été achetées.


    Vous l’aurez peut-être deviné, Concordia n’est pas un deckbuilder « classique » où on joue et on achète tout plein de cartes; il comprend, entre autres, une importante dimension de gestion de ressources, de développement économique et de contrôle de territoire. Mais le cœur de ce jeu, ce sont les cartes que vous avez entre les mains et, surtout, la manière dont vous allez développer cette main grâce à de nouvelles cartes Personnages. Car les points que l’on marque proviennent directement des cartes que l’on aura en notre possession à la fin de la partie. En effet, chaque carte est associée à un dieu du panthéon romain (Vénus, Minerve, Mars, Mercure, etc.) Chaque dieu a sa sphère d’influence et récompense (en points) vos accomplissements dans UNE des facettes stratégiques du jeu. Par exemple, Vénus vous donne des points pour chaque province où vous avez construit au moins deux comptoirs commerciaux. Vous avez trois cartes associées à Vénus à la fin de la partie ? Multipliez vos points par trois ! De leur côté, Saturne vous encourage à vous répandre dans le plus grand nombre de provinces possible, Mercure récompense la variété dans les ressources que vous produisez, Vesta célèbre les économes qui empilent les sesterces, etc. Il est donc capital de choisir avec soin sa stratégie en fonction des cartes/dieux que l’on intègre à notre jeu.


    Une dernière chose qui fait l’originalité de Concordia : on peut jouer en équipes (2v2 ou 2v2v2)! C’est rarissime qu’un jeu de ce type propose une telle variante, et c’est aussi très intéressant (et difficile) sur le plan stratégique : quand on fait une action, notre partenaire de jeu peut suivre et faire la même action de son côté. Les points des membres de l’équipe sont additionnés à la fin de la partie. Non seulement faut-il planifier savamment notre stratégie personnelle, mais on doit en plus s’organiser pour que notre partenaire puisse profiter de nos actions de manière efficace. C’est vraiment tout un casse-tête ! 


    La dernière édition de Concordia fusionne le jeu de base et son extension Vénus. Il existe également plusieurs autres extensions : Solitaria propose un mode solo,  Salsa intègre de nouvelles villes produisant du sel (une ressource “joker”), sans compter les multiples plateaux de régions supplémentaires que l’on peut acheter pour ajouter de la diversité et des défis supplémentaires en fonction du nombre de joueurs.


    Que dire de plus ? Je l’aime d’amour, ce jeu.


    Concordia Venus, de Mac Gerdts

    Publié par Rio Grande, 2 à 6 joueurs, 14 ans et +, 60 à 120 minutes par partie


    Conclusion

     

     

    Quelle aventure que ce premier top 10 ! C’est un exercice vraiment plus difficile qu’il n’y paraît, et je sais d’ores et déjà qu’on me reprochera (à juste titre!) de ne pas y avoir inclus tel ou tel jeu qui mériterait sans doute d’y figurer. Mea Culpa ! J’ai personnellement dû écarter plusieurs jeux que j’adore, soit parce qu’ils sont difficiles à trouver, soit parce qu’ils ne remplissaient pas certains des critères de sélection que je m’étais fixés au départ. Mais il faut bien choisir… parce qu’un top 350, c’est nettement moins utile qu’un top 10!

    -Mat


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